Les dirigeants de l’armée belge appellent, dans une note interne, à ce que les remplaçants des F-16 perpétuent la capacité nucléaire de notre flotte aérienne, contre l’avis d’une grande majorité de la population belge. A la veille de la conférence de révision du Traité de non-prolifération, la Belgique veut-elle continuer à être une des responsables de la crise de la dynamique internationale sur la question nucléaire ?
La note stratégique confidentielle de la défense, dont la presse a pu avoir connaissance, nous apprend que les dirigeants de l’armée belge souhaitent que le successeur des avions de chasse F-16 puisse continuer de pouvoir transporter et larguer des bombes nucléaires dont, bien sûr, celles présentes en Belgique depuis près de 40 ans maintenant. D’après eux, la capacité nucléaire de la flotte aérienne belge permet à notre pays de jouer un rôle de premier plan dans la stratégie de dissuasion nucléaire de l’OTAN et d’ainsi occuper une place stratégique plus importante que celle à laquelle elle pourrait prétendre vu sa taille et sa position. Cet argument semble trouver écho dans les commentaires qui fleurissent de ci de là qui rappellent l’importance – surtout économique – de la sécurité de notre pays. Des arguments qui cautionnent finalement la détention d’armes nucléaires et leur potentielle utilisation.
Rappelons tout d’abord que les armes nucléaires ne sont pas de simples armes. Les bombes nucléaires américaines B61 présentes à Kleine Brogel sont au moins dix fois plus puissantes que les bombes nucléaires qui, en quelques secondes, ont décimé des centaines de milliers de personnes à Hiroshima et Nagasaki, il y a exactement 70 ans. Les armes nucléaires ne font aucune discrimination entre les citoyens et les cibles militaires et entraîne des conséquences catastrophiques sur l’environnement. Le caractère exceptionnel de ces bombes a poussé la Cour internationale de justice de La Haye à déclarer illégale l’utilisation et la menace d’utilisation d’armes nucléaires.
Notons ensuite qu’il n’y a pas de soutien sociétal en Belgique en faveur d’un quelconque rôle nucléaire de l’OTAN. Ainsi, Une étude menée par l’Université d’Anvers (Mars 2014) souligne que 61% de la population belge est en faveur du retrait des armes nucléaires stockées sur notre territoire. Cette même étude montre d’ailleurs que cette volonté est partagée par la majorité des militants de tous les partis confondus, y compris ceux qui forment l’actuelle majorité gouvernementale.
Troisièmement, afin d’assurer le plus pleinement possible sa sécurité, un petit pays peut et doit s’appuyer sur un ordre juridique international qui s’applique à tous les pays. Ce principe est l’essence même du Traité de non-prolifération (TNP), entré en vigueur en 1970 et signé par 190 pays. Ce Traité enjoint les États non dotés d’armes nucléaires de renoncer aux armes nucléaires, interdit aux États dotés d’armes nucléaires de répandre leurs armes nucléaires vers les États non-nucléaires (comme le font les États-Unis en Belgique) et oblige les États dotés de ces armes à réduire leur arsenal nucléaire. On le voit, la doctrine de dissuasion de l’OTAN est contraire à l’esprit et à la lettre du TNP, et la Belgique contribue activement à cette violation massive et flagrante. En mai, tous les États parties au Traité se réuniront à New York pour sa conférence de révision. Quel y sera le message de la Belgique ? Nous voulons de nouveaux avions de chasse afin de continuer à déployer des armes nucléaires modernisées.
Si la Belgique veut vraiment et sincèrement assurer la sécurité, elle ne peut le faire qu’en appelant ouvertement à une interdiction des armes nucléaires, au respect strict et inconditionné du Traité de non-prolifération, à l’abandon de la politique de dissuasion de l’OTAN – la première cause de la prolifération et du non-désarmement nucléaire – et au refus de remplacer les chasseurs-bombardiers F-16 : #pasdavionsdechasse !