Devrons-nous attendre le prochain Sommet de la francophonie pour voir les appels internationaux pour la fin des violences dans l’Est du Congo et l’instauration d’un État de droit se concrétiser ? Une échéance électorale arrive pourtant et les violences se sont gravement accentuées à l’Est du pays.
Depuis le Sommet de la francophonie qui se tenait à Kinshasa les 13 et 14 octobre dernier, les événements se sont succédé à l’Est de la République démocratique du Congo : la guerre s’y est intensifiée, soulignant la désorganisation de l’État congolais, les complicités régionales au mouvement de rébellion et l’inaction de la Mission des Nations-Unies. L’analyse diffusée par la CNAPD à l’occasion du Sommet de la francophonie n’a malheureusement pas perdu de son actualité, mais s’inscrit à nouveau dans un cadre où les pressions diplomatiques internationales sont retombées comme un soufflé.
Pour rappel, le Sommet de la francophonie a été le théâtre de tensions diplomatiques. En effet, certains chefs d’États occidentaux, au premier rang desquels François Hollande, tergiversaient quant à leur présence au Sommet, dans un pays en proie à une guerre « civile » et à toutes les violences qui lui sont intrinsèques, à des déplacements massifs de population, à la systématisation internationale du pillage de ses ressources naturelles, au déni de démocratie et au non-respect de l’État de droit. C’est sur cette dernière question plus particulièrement que la présence de certains dirigeants a été questionnée, en demandant une dépolitisation de la Commission électorale congolaise ou la poursuite des assassins de Floribert Chebeya, dont l’affaire marque à elle seule les manquements graves à l’état de droit. En Belgique, la question a été réglée : Elio Di Rupo se fera représenter par son Ministre des Affaires étrangères.
Comme d’autres associations de la société civile belge, la CNAPD a plaidé – et plaide toujours – pour que les représentants politiques participent à toute forme de dialogue diplomatique poursuivant les objectifs de développement de la démocratie, la gestion et le règlement des conflits et le soutien à l’État de droit. Or, le Sommet a été une occasion donnée aux interlocuteurs internationaux de mettre les pays frontaliers de la RDC devant leur responsabilité dans la guerre qui fait rage depuis trop longtemps à l’Est du pays. Responsabilité depuis longtemps épinglée par la société civile et tardivement relayée par certains Gouvernements, au rang desquels l’absence de la Belgique. Cette dernière a entre-temps fait droit aux revendications de la remise en cause des accords militaires de la Belgique avec le Rwanda. Mais depuis la fin du Sommet, force est de constater le vide diplomatique face auquel nous nous trouvons à nouveau.
Pourtant, la CNAPD rappelait que la guerre civile qui fait rage depuis 1996 au Kivu prend pour cadre et est alimentée par la richesse minière de cette région. Davantage que la « bonne gouvernance », un arsenal juridique international doit être construit pour endiguer la contrebande. Une certification des minerais, au même titre que celle en vigueur sur le diamant depuis le processus de Kimberley, doit être appliquée. Des obligations de transparence doivent être arrêtées, suivant par exemple la toute fraîche loi américaine « Dodd Frank » obligeant les entreprises à établir si leurs produits contiennent des minerais du conflit, en soumettant leur chaîne d’approvisionnement à une diligence raisonnable (terme de droit anglo-saxon pouvant être traduit par le devoir de précaution). La lenteur avec laquelle ces procédures internationales se construisent et les obstacles institutionnels rencontrés par les associations de la société civile, notamment en Belgique et en Europe, traduisent mal les discours politiques ânonnant des objectifs de paix et de développement dans la région des Grands-Lacs. La cessation rapide des hostilités – objectif partagé, on l’imagine, par tous – ne peut être pérennisé qu’à la condition d’un encadrement juridique fort du commerce (extraction – vente – achat) des minerais. Le travail pour des échanges économiques justes et transparents semble n’être toujours pas mis sur pied, malgré les volontés affichées à l’occasion du Sommet de la francophonie.