Ce 21 septembre, journée internationale pour la paix, Vladimir Poutine a annoncé une mobilisation partielle de la société russe et menace une nouvelle fois d’utiliser l’arme nucléaire en cas d’attaque sur son territoire. Une déclaration qui, en elle-même, ne devrait susciter que l’effroi… et donc la prudence.
Quand on observe les commentaires médiatiques et politiques du lendemain de cette annonce, c’est pourtant la hargne et la volonté d’en découdre qui continuent de dominer. Et de façonner les esprits. On se gausse des difficultés militaires de l’armée russe, on soutient que c’est une bêteblessée qui parle et on en conclut qu’il faut prolonger la logique guerrière dans laquelle nous sommes. La Présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a été jusqu’à assumer publiquement ce 22 septembre qu’elle rejetait toute idée de cessez-le-feu : « il y a beaucoup en jeu, pas seulement pour l’Ukraine » a-t-elle osé dire, confirmant que l’Union européenne n’était pas dans une posture de soutien au peuple ukrainien agressé, mais bien dans une logique de guerre contre la Russie.Quel ressort psychologique explique cet hubris collectif dont nos sociétés sont manifestement atteintes ?Nous pouvons le lire, l’entendre, le voir constamment : Poutine est l’agresseur, un nuisant, un sanguinaire, un dictateur qui s’assied sur le Droit et qui met en péril l’ordre international. Soit. Mais quelle est l’utilité d’ânonner ce type de remontrances jour après jour, si ce n’est pour nourrir le ressentiment et l’hostilité, abreuver ces pulsions violentes qui nous traversent et donc continuer de creuser le gouffre qui nous sépare d’un cessez-le-feu ?Nous pouvons parer Vladimir Poutine de tous les maux de la terre, il n’en reste pas moins notre voisin. Un voisin piqué dans son orgueil (émotion que nous ne connaissons que trop bien). Et un voisin doté de l’arme nucléaire. Le fait que le Président russe soit en mauvaise posture et menace d’utiliser la bombe nucléaire ne devrait pas cajoler notre sentiment de supériorité. Cela devrait au contraire réveiller notre intelligence. L’arme atomique n’aurait jamais dû être construite et il faut, particulièrement maintenant, déployer tous les efforts pour nous assurer qu’elle ne soit (plus) jamais utilisée. Il y a 2000 têtes nucléaires en état d’alerte permanente dans le monde. Et elles ne sont pas toutes russes, loin s’en faut. Ces armes nous font vivre sur un château de cartes, sur lequel nous continuons allègrement de souffler. Le seul abri anti-atomique, c’est un monde débarrassé de la bombe nucléaire.Certains et certaines auront beau jeu de déceler, dans ces quelques lignes épidermiques, un aveu de faiblesse, une couardise. C’est tout à fait assumé : la posture défendue ici n’est pas très chevaleresque. Nous défendons en effet une définition autrement plus judicieuse du courage. Nous pouvons ainsi tourner le problème dans tous les sens : depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, nous jouons avec le feu et nous n’avons, décidément, aucun intérêt véritable à le faire. Tous les conflits se terminent par la capitulation ou des négociations. La première option étant inenvisageable, écourtons ce gâchis qui précède la seconde.