Et pas n’importe laquelle : « Grandola Vila Morena », la chanson du poète et révolutionnaire portugais José Afonso, celle qui, à minuit 20’ le 25 avril 1974, donna le signal de la fin de la dictature fasciste et du colonialisme portugais.
La CNAPD a commémoré, avec un peu de retard, le 40e anniversaire de la Révolution des Œillets, en écoutant Jean Lemaître, auteur du livre consacré à cet événement historique : « Grandola Vila Morena, le roman d’une chanson ». Les plus âgés parmi les militants de la CNAPD s’en sont souvenu avec beaucoup d’émotion et les plus jeunes ont découvert une des grandes luttes contre le fascisme, qui a sévi au Portugal, mais aussi en Espagne, en Grèce, en Turquie, jusque dans les années 1970-80.
Un aspect notable de la révolution du 25 avril est le protagonisme des militaires : ce sont « les Capitaines d’Avril » qui ont déclenché le grand bouleversement politique et social. En écoutant la chanson « Grandola Vila Morena », les officiers et soldats de toutes les casernes du pays ont mis leurs chefs aux arrêts et se sont dirigés vers Lisbonne pour déloger le gouvernement de Marcelo Gaetano, successeur du dictateur Salazar. Ils ont reçu un soutien populaire massif et ont mené un mouvement politique très profond, avec toutes les forces démocratiques du pays. Il en est sorti la Constitution la plus progressiste d’Europe et de grandes conquêtes sociales et politiques qui ont transformé le Portugal.
Aujourd’hui encore, le 25 Avril et la chanson Grandola Vila Morena, font partie de toutes les manifestations populaires. Jean Lemaître l’a vécu lorsque, le 2 mars 2013, un million de gens ont défilé dans les rues de Lisbonne contre les mesures d’austérité imposées au peuple par la Troika et l’Union Européenne, en chantant « Grandola ». Nous avons pu le constater également, lors de la participation de la CNAPD aux actions contre le Sommet de l’OTAN à Lisbonne en 2008 : un grand nombre de manifestants portaient des pancartes : « Non à l’Otan, Si au 25 Avril ».
Ce mouvement surgi au sein d’une armée dirigée par un pouvoir fasciste, capable de bouleverser l’ordre politique et social sans même verser le sang, peut sembler déroutant. Pourtant cela s’est passé au Portugal, et cela se passe aujourd’hui encore dans beaucoup de pays, en particulier en Amérique Latine. Cela montre que les militaires eux-mêmes reçoivent l’influence de la population qui ne veut pas de la guerre.
Dans la plupart des pays d’Europe et aux États-Unis, le service militaire a été supprimé et remplacé par des armées de métier, par des Robocops et par l’utilisation des drones, des missiles et des armes de destruction massive à la place des humains. La révolte des militaires portugais, tout comme celle des soldats américains revenant de la guerre du Vietnam, ou d’Irak, y est pour quelque chose.
Le petit livre de Jean Lemaître et son art de raconter le « roman d’une chanson » méritent d’autres midis de la CNAPD et d’être connus de tout le mouvement de la paix.
Claudine Pôlet.